Croix vertes d'un côté, manifs massives de tracteurs de l'autre: rien ne va plus en Allemagne et aux Pays Bas. Et des deux cotés, on se demande si les manifestations de mauvaise humeur resteront à ce niveau modéré, ou si une explosion doit être redoutée.
Dans les deux cas, un détonateur connu, et précis, a fonctionné.
- En Allemagne c’est le « paquet toxique » annoncé par le gouvernement, fait de transferts de crédits à partir des aides directes vers les programmes environnementaux, des labels de bien-être animal, et de programme de protection des insectes avec suppression programmée du glyphosate.
- Au Pays- Bas c’est l’annonce par un parti politique au gouvernement de l’obligation de réduire encore de moitié les cheptels néerlandais, et de passer à une économie agricole dite « circulaire » pour, accessoirement, libérer des surfaces pour l’habitat !
Dans les deux cas le détonateur a fonctionné sur une charge accumulée de griefs et de rancoeur. Dans d’autres conjonctures les étincelles de mise à feu auraient été perçues à l’avance et neutralisées au cours de négociations élargies. Les modifications des quotas d’émissions de phosphorer, les sécheresses, et surtout les mises en accusations d’être des « climats killers » faites aux agriculteurs ont mis le feu à l'étoupe.
En fait deux sentiments dominent dans ces deux agricultures.
D’abord un sentiment de tonneau sans fond : toujours plus de contraintes, jamais de pause, et aucune reconnaissance de ce qui a été accompli ! Et ensuite la perte progressive de la capacité d’influencer les thèmes agricoles en débat permanent dans la société. Ce sont d’autres maintenant qui imposent ces thèmes, avec la prétention de vouloir le bien de l’agriculture mais en pratiquant un bashing de l’agriculture et des agriculteurs devenu insupportable. Ajoutez à cela les leçons de l’activisme climatique de « Fridays for Future » et autres adeptes de Gretha, pour faire monter la température.
La violence, certes, n’a jamais été une solution, mais elle aussi est susceptible d’être transfrontalière. Dans les deux pays, les populistes d’extrême-droite sont à l’affut pour récupérer les mouvements : l’AfD en Allemagne, et aux Pays-Bas Geert Wilders et les siens.
Signe inquiétant des temps actuels : aux Pays-Bas des agriculteurs ont été contraints de créer une milice, sous le logo de trois fourches croisées, pour se défendre contre les intrusions violentes dans leurs étables d’activistes écolos, que l’Etat à trop longtemps toléré sans réagir !
(Ndlr : En politique aussi, il y a une sorte de ligne de flottaison. Quand on laisse s’enfoncer la barque trop en dessous, le naufrage n’est pas loin ! )