Le Conseil de ministres de l’Agriculture, et le Parlement européen, sont arrivés l'un et l'autre à une position de compromis
Les ministres de l‘Agriculture, sous la présidence de la ministre allemande Julia Klöckner, se sont mis d’accord mardi 20 octobre sur l’orientation générale de la Politique Agricole Commune.
Celle-ci a été approuvée à la majorité qualifiée, seules la Lituanie et la Lettonie l’ont rejetée, la Bulgarie et la Roumanie s’étant abstenues. Le Parlement européen a également adopté une position de compromis sur la réforme de la PAC.
Après 40 heures de négociations, et sur la troisième proposition de compromis de Julia Klöckner, les ministres UE de l’Agriculture ont trouvé un compromis sur le point central qui était encore en discussion : les Etats doivent consacrer au moins 20 % de moyens financiers du premier pilier, au financement des éco-schèmes (ou éco-régimes), ce que les pays de l’UE-Est avaient refusé jusqu’à présent.
Les éco-schèmes sont le noyau de l’architecture verte de la PAC, et un jalon essentiel vers un changement de système, selon Julia Klöckner. Une période de transition de 2 ans est prévue. Si un Etat n’arrive pas pendant ces deux ans à utiliser les moyens financiers pour les éco-schèmes, ces moyens seraient remis à disposition dans le premier pilier pour le pays.
Les écho-schèmes restent volontaires, selon les décisions des ministres. Mais la part minimum des aides directes qui leur est réservée crée évidemment une incitation forte pour que les agriculteurs participent à ces programmes, y compris les petites exploitations, que certains Etats tendaient à en exclure.
Le Commissaire Janusz Wojciechowski constate que la position du Conseil diffère sur certains points de celle de la Commission, mais considère que c’est une bonne base pour le trilogue. Il lui semble-même que l’on se dirige vers des éco-schèmes obligatoires, car le Parlement européen vient de se prononcer pour 30 % des aides directes pour les écho-schèmes, et le Commissaire veut orienter en trilogue les décisions vers ces 30 %.
Au Parlement européen, la proposition des groupes PPE, S&D, et Renew Europe a trouvé une majorité pour écarter une proposition de rejet complet des propositions de la Commission concernant la réforme de la PAC.
Les éléments principaux du compromis parlementaire sont :
- 30 % des moyens du premier pilier pour les éco-schèmes ;
- jusqu’à 12 % de transferts financiers vers le second pilier ;
- au moins 60 % des moyens du premier pilier pour les primes de base, et les aide couplées ;
- 35 % du second pilier consacrés à l’environnement et à la protection du climat,
- 30% au second pilier pour des investissements relevant de l’environnement ;
- baisse des aides couplées à 10 % des aides directes (+2 % pour les cultures de protéagineux),
- 5 % du second pilier pourraient être reversés au premier pilier si cela renforce les règles environnementales, ce reversement peut aller jusqu’à 12 % pour les pays dont les aide directes sont inférieures à la moyenne européenne - 5 % de surface à vocation écologique, avec option possible de passer à 10 % pour certains Etats.
Le vote groupé final aura lieu vendredi prochain 23 octobre.
Le trilogue pourra commencer avec l’objectif de conclure au premier trimestre 2021, afin de permettre une application de la PAC réformée en 2023. Prévision : ce ne sera pas une promenade tranquille…
Chez les Verts allemands et parmi les députés les plus sensibles aux questions environnementales, on assiste à des rafales de critiques connues car les orientations sont prises pour toute la période 2021/2027. En résumé : c’est une catastrophe pour la nature et le climat ; la politique destructrice actuelle sera poursuivie; les subventions iront pour l’agriculture industrielle ; c’est une dilution supplémentaire des propositions déjà très faibles de la Commission européenne ; un encouragement pour la disparition accélérée des petites exploitations agricoles ; une nouvelle perte en diversité des espèces ; un clientélisme politique pour les grands agriculteurs, etc., etc…
Pour Robert Habeck, le président de Alliance 90/ Les Verts, ces décisions ne permettront pas d’atteindre les objectifs que l’UE s’est elle-même fixés. Il fallait, d’après lui, supprimer les aides directes au bénéfice de rémunérations de prestations à la collectivité. Et il regrette que l’on ne tienne que si peu compte des avis de la société et des scientifiques – ce qui fait sourire les observateurs qui se souviennent de ses diatribes contre les biotechnologies moderne pour l’agriculture, contre l’avis des scientifiques !
Le DBV donne la tonalité générale dans l’agriculture allemande. C’est un compromis nécessaire, et en définitif acceptable. Pour Joachim Rukwied, le chemin vers une politique agricole plus verte continue. Les structures actuelles des financements agricoles sont significativement modifiées.
Les financements agro-environnementaux doublent, les critiques des écologistes ne reposent donc sur aucune base. Il reste dans ce compromis un soutien garanti au revenu agricole. Ce qui est important, c’est que les éco-schèmes restent optionnels, mais dans un cadre européen obligatoire, pour éviter un patchwork européen. AM