Dans le temps, les marchands de vin britanniques faisaient la course pour rapporter au Royaume-Uni le beaujolais nouveau. Mais désormais, les pentes douces du Herefordshire leur donnent leur premier vin rouge primeur, dans un vignoble anglais qui ne cesse de croître.
Comme son aîné français, l'"English Nouveau" coulera le troisième jeudi de novembre. Au nez, des arômes de "cerise, de mûre, de canneberges", mais aussi de fruits exotiques, pour un vin "à ne pas trop prendre au sérieux", explique à l'AFP Simon Day, vigneron à Ledbury, dans l'ouest de l'Angleterre. C'est un vin "pour s'amuser", dans la morosité ambiante due à la pandémie de Covid-19, un "petit rayon de soleil" pour "terminer l'année".
À la fin des années 1970, début des années 1980, il se souvient que les marchands de vin britanniques rivalisaient pour être le premier à rapporter, directement de chez les producteurs français, du beaujolais nouveau, en faisant la route "le plus vite possible" à bord de leurs voitures de sport, remplies de caisses de vin.
"C'était un grand événement", "beaucoup de presse", "beaucoup de rigolade", souligne Simon Day, qui espère aujourd'hui "que l'on puisse aussi fêter le bon vin rouge anglais".
Le vigneron est en effet le premier à produire un vin primeur rouge au Royaume-Uni. La cuvée 2020 est sa deuxième. L'intégralité de la production, 2500 bouteilles, sera vendue cette année dans une chaîne de supermarchés, Waitrose, pour 11,99 livres la bouteille (14,50 €), plus cher que les beaujolais nouveaux français, dont la plupart se vendent entre cinq et dix euros dans le commerce.
Au traditionnel cépage gamay, le vigneron anglais a préféré le pinot noir. Le procédé de vinification en revanche est le même, la macération carbonique, qui permet d'extraire saveur et couleur du raisin sans tanins trop prononcés.
Dans la région, la vigne prend de plus en plus de place, au détriment des pommiers, moins rentables. La Grande-Bretagne comptait l'an dernier 3500 hectares de vignes, une surface qui a quadruplé depuis 2000 et augmenté de 150% en 10 ans, selon l'organisme de la profession Wine GB. L'île compte 770 vignobles, qui produisent 72% de vins pétillants.
Un autre facteur vient expliquer cette croissance: le réchauffement climatique. Simon Day, qui est l'un des rares vignerons de deuxième génération, a ainsi pu constater lui-même que les vendanges se font en moyenne deux à trois semaines plus tôt que qu'au début de sa carrière.